Nous sommes en escale au port de Zante. Comme d'habitude en Grèce, il y a une marina, mais elle n'a jamais été terminée, et comme les enrochements qui devaient protéger le quai extérieur n'ont jamais été réalisés, les tempêtes d'hiver l'ont à peu près détruite! C'est sans doute pour compenser cette mauvaise réputation que le port comporte un comité d'accueil. j'étais encore en train d'attacher les amarres qu'un bougre se précipite, demande les papiers du bateau et nous explique que pour 15€, on a droit à l'amarrage, à l'eau et l'électricité. Il regarde à peine les papiers, touche les sous, et s'étonne quand on lui demande où se brancher ; une borne ne fonctionne pas ; une autre fonctionne non sans peine. Simultanément arrive sur le bateau un tuyau d'eau ; elle est sous pression, et ça reflue tellement que je ne suis pas certain que le részervoir soit réellement rempli. Surprise, c'est un camion citerne qui nous a glissé son tuyau en douce, et non l'eau du port ; il nous demande 10€ ; protestations ; finalement il transige à 5. J'avoue que contrairement à la Turquie, c'est la première fois que je me fais filouter en Grèce! Le camion d'essence arrive dans la foulée et nous délivre 20 l de gas-oilo à un prix raisonnable. Jamais vu autant d'activité fébrile à l'arrivée d'un bateau de plaisance, en Grèce, et même ailleurs!
Le lendemain, nous décidons de faire un tour en voiture dans l'île, Zöe au volant, excellente conductrice. La première étape consiste à trouver une entreprise GROPAS qui serait susceptible de nous échanger notre bouteille de gaz épuisée. Une heure de recherche ne nous amène à aucune solution compatible avec les indications du loueur de voiture ; nous laissons tomber l'affaire! Pas très étonné ; trouver du gaz en Grèce ou en Turquie relève du parcours du combattant : épuisant et le plus souvent totalement inutile.
Ensuite, nous roulons vers le sud : la plage de Lagana, protégée par une zone interdite aux plaisanciers ; un des rares sites de ponte de la tortue carette en Europe. Il est interdit d'aller sur cette plage du coucher au lever du soleil pour ne pas gêner la difficile progression des bestioles jusqu'au fond de la plage où elles se débarassent de leur précieux fardeau et l'enterrent. Nous sommes sidérés de voir la plage remplie à ras bord de transats. Une cabane publicitaire des écolos grecs nous donne accès à une documentation. Il y a des espèces de petits tabourets posés sur le sable pour signaler les nids repérés et empêcher qu'on les écrase. Parait-il que tous les transats sont enlevés la nuit. En tout cas si les pauvres tortues arrivent encore à pondre au fond de la plage, c'est qu'elles ont de la suite dans les idées.
Un peu désespérés par le résultat de cette lutte inégale entre la survie d'une espèce et les intérets économiques liés au tourisme, nous partons vers le nord vers Agios Nicolaos décrit comme un charmant village de pêcheur d'où l'on peut partir voir les grottes (blue caves) situées à l'extrèmité nord de l'île. Nous traversons des paysages magnifiques très verts et vallonés.
Déception : à Agios Nicolaos, nous assistons à une migration claudicante et piaillante d'êtres rougeatres issus de volumineux cars pulmann et se dirigeant vers des tavernas, sans doute leur lieu de ponte.
Nous renonçons et repartons un peu plus loin, par une route étroite avec des épingles à cheveux, opportunément impraticables pour les pulmann. Un panneau nous promet un endroit inoubliable, de quoi boire, de quoi manger, de quoi se reposer (Photo N°1) .Génial, un vrai petit coin de paradis sous un petit moulin authentique (Photo N°2), ou au moins fonctionnant vraiment au vent. Un petit restau très correct, raisonnable.
Encore une promesse : "down the steps for amazing swim". Eh bien c'était vrai aussi (it was true! précise Michel qui parle et entend les deux langues). Une cinquantaine de mètres en descente par un escalier facile nous amène à une petite esplanade avec pergola. En contrebas, on peut descendre dans une eau limpide et nager. Il n'y a pas plus que 5 personnes. On voit passer les bateaux d'excursion pour les "blue caves", tout près. Après un strip plus ou moins discret, nous sommes prêts, mais Michel improvise et décide un plongeon d'un rocher, une dizaine de mètres au dessus des flots, se prépare (Photo N°3, merci Zöe), et exécute un saut parfait (Photo N°4). Les 5 touristes de l'esplanade, sans doute un comité d'admiratrices rénumérées par Michel (?) s'exclament et applaudissent l'artiste. Avouez qu'il y avait de quoi.
Nous nageons et trouvons à une centaine de mètres une toute petite entrée de grotte, haute d'à peine 50 cm ; nous y entrons tous les trois et le plafond de la salle qui s'évase est beaucoup plus haut. La grotte est éclairée par le clarté bleutée de la mer qui s'infiltre par la petite entrée. Magie, celle-là les touristes ne la visiteront pas en bateau. Désolé, je n'avais pas pris l'appareil photo!
Nous allons nous reposer sur un rocher ; derrière, encore cent mètres et c'est les arches et les grottes promises. Michel et Zöe iront à la nage ; pour moi les 200 mètres pour rentrer à la nage seront suffisants. En se rhabillant, nous apercevons une tête préhistorique dans les vaguelettes, qui disparait aussitôt, suivie par un corps trapu : une tortue carette. Nous ne la verrons pas remonter ; elle aura encore un peu de chemin jusqu'à la maternité, à l'autre bout de l'île.
Zante n'a pas fini de nous émerveiller ; encore quelques kilomètres et nous nous trouvons au milieu d'oliviers millénaires. Ce serait trop long à transmettre mais les troncs sont extraordinaires, énormes, tout biscornus et torturés. Et sur la route du retour, par l'est de l'île, un arrêt à une petite plateforme 100 mètres au dessus de la "shipwreck bay", petite crique où repose l'épavec d'un bateau naufragé (pas d'indication sur l'époque de l'accident ni les victimes habituelles). Une vue impressionnante sur les falaises, l'eau cristalline, la petite crique (Photo N°5). Zante me parait vraiment une île encore très naturelle et merveilleuse à visiter ; elle aurait mérité un arrêt plus long.